Ce témoignage explore la question de la découverte de la différence, de la couleur de peau et de la solitude que l’on peut ressentir en tant que personne adoptée
« "Je t'ai presque rattrapée, hein!"
Cette phrase, on me la disait en vacances. Leur avant-bras côte à côte avec le mien. J'étais le référent bronzage. Ça me distanciait des autres car je n'avais pas ce but pendant les vacances. Les vacances en famille se sont vite révélées avec beaucoup de moment de solitude, car tout le monde voulait bronzer. Je n'en voyais pas l'utilité.
Mon expérience de l'adoption se résume en un mot: la solitude.
Au quotidien, il y avait toujours un petit quelque chose qui rappelle que je ne ressemble à personne, que j'étais noire alors que tout le monde était blanc autour de moi.
J'ai grandi avec peu de personnes racisées autour de moi. Les seules personnes qu'il y avait dans l'entourage de mes parents, elles sont en partie arrivées grâce à moi. C'étaient les parents de mes camarades de classe. Vers 10 ans, j'ai déménagé et j'étais maintenant là seule noire de la classe. Je ne le remarquais pas. Je ne voyais pas les couleurs, et encore moins la mienne. Je me suis sentie encore plus seule car il n'y avait plus personne pour s'occuper de mes cheveux. (C'était les mères d'ami.e.s qui s'occupaient de mes cheveux). Et quand on allait avec ma mère (d'adoption) dans des salons de coiffure, la plupart ne savait pas m'occuper de cheveux afro. Encore aujourd'hui c'est rare que les coiffeureuses blanc.he.s soient formé.e.s pour s'occuper de cheveux afro. Mon corps, tel qu'il est, est une des raisons pour laquelle je me sentais seule et s'ajoutant à ça ma neuroatypie et ma bisexualité. Le fossé s'agrandissait.
Cette situation a créé beaucoup d'incohérence et de dissonance dans mon esprit.
Les moments où je me sentais la plus seule c'est lorsque que j'assistais à une conversation sur qui ressemble à qui dans la famille. Cette conversation me fascinait tout en me faisant sentir exclue.
Un autre de ses problèmes, c'est parler de problèmes de santé. Surtout qu'aujourd'hui, c'est un fait bien connu que beaucoup de pathologies sont génétiques.
Dans ma famille, il y a des problèmes de santé qui sont génétiques. Il m'est souvent arrivée d'assister à ce type de conversation encore plus après le diagnostic d'un cancer chez mon père (d'adoption). Et cette solitude s'est encore plus marquée quand j'ai commencé à avoir des problèmes de santé moi-même. À chaque fois, j'était diagnostiquée avec une pathologie génétique.
Il y a tellement de choses au quotidien qui font que je me sens seule. Je me rends compte maintenant que j'ai tellement voulu m'intégrer que j'y ai laissé ma santé mentale. Je voulais tellement être inclue. Je voulais avoir quelqu'un qui me ressemble. Je me suis oubliée, je ne savais plus qui j'étais. Et là encore je cherche parfois.
Témoignage par Moa (prononcé Mo)
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